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Découverte d’une barre lente dans une galaxie spirale

» mercredi 20 mai 2009

Depuis un peu plus d’une décennie, les observations de la cinématique des galaxies spirales montrent que les barres d’étoiles au centre des galaxies sont en rotation rapide. Ces mesures concernent presque exclusivement des galaxies spirales brillantes de type morphologique précoce, telles que les galaxies lenticulaires (S0). De nouvelles observations réalisées par une équipe internationale, dont un chercheur de l’Observatoire de Paris, ont permis de mettre en évidence pour la première fois une barre stellaire lente dans un autre type de galaxie - une galaxie spirale de type tardif magellanique (Sm). La galaxie observée, UGC 628, a aussi la particularité d’être une galaxie à faible brillance de surface dont la masse totale est dominée entièrement par celle de la matière noire.

Les barres sont des ondes de densité qui tournent à vitesse angulaire constante dans une galaxie à disque, alors que la vitesse des étoiles varie en fonction de la distance au centre : très rapides au centre, et plus lentes au bord. La barre tourne donc plus lentement que les étoiles au même rayon, et ne peut pas dépasser le rayon de corotation, où elle tourne à la même vitesse que les étoiles. Par contre, les simulations prévoient que la barre pourrait s’arrêter en deçà, soit à cause de la morphologie sans bulbe de la galaxie, soit à cause du freinage de la matière noire. Mais rares sont ces cas de barres lentes dans les observations, et la théorie n’a pas pu encore être entièrement confirmée.

Figure 1 : Galaxie UGC 628
image en bande large (à gauche), carte d’émission Halpha (au centre), champ de vitesse Halpha (à droite). Sur l’image de gauche, la barre est facilement identifiable au centre de la galaxie par une surbrillance du disque stellaire.

UGC 628 (Figure 1) a été observée par interférométrie optique de Fabry-Perot dans la raie Halpha du gaz ionisé avec l’instrument FaNTOmM installé sur le Télescope Canada-France-Hawaii. La vitesse angulaire de rotation de la barre, notée Omega-p, a été déduite en appliquant la méthode dite de Tremaine-Weinberg (TW) qui est la seule méthode observationnelle permettant d’avoir accès à la mesure directe de la vitesse angulaire d’une barre (ou plus généralement d’une perturbation) dans une galaxie, sans passer par un modèle des observations.

Figure 2 : Mesure de la vitesse angulaire de rotation de la barre stellaire de UGC 628 par la méthode TW.
La vitesse angulaire est la pente de la relation (droite tracée en trait continu) ajustée à partir des points de mesures cinématiques dans la région de la barre (symbolisés par des carrés pleins). Les symboles ouverts sont les points de mesure en dehors de la barre. Ils sont ajustés par la droite en pointillés, dont la pente correspondrait à la vitesse de la spirale, en dehors de la barre.

Une barre est dite rapide quand le rapport de son rayon de corotation (Rc, où sa vitesse égale la vitesse de rotation des étoiles), à sa taille (Rb, ou rayon de la barre) est compris entre 1.0 et 1.4 : 1.0 < Rc/Rb < 1.4. Une barre ayant Rc/Rb > 1.4 est dite lente. Jusqu’à présent, la méthode TW avait permis d’identifier uniquement des vitesses angulaires compatibles avec des barres rapides (dans des galaxies brillantes et de type précoce). Pour UGC 628, il est mesuré Omega-p = 11.3 km/s/kpc (Figure 2). Cette amplitude est la plus faible observée jusqu’à présent pour une barre d’étoiles. Cette mesure implique un rapport Rc/Rb = 2.0, et ainsi une barre lente dans UGC 628.

Bien que cette mesure reste pour le moment un cas très isolé, la découverte d’une barre lente dans une galaxie de type Sm tend à montrer qu’il existe une corrélation entre la vitesse angulaire des barres et le type morphologique des galaxies : la vitesse angulaire décroît du type précoce vers le type tardif. Par ailleurs, la présence d’une composante de matière noire qui domine la masse totale de UGC 628 contribue vraisemblablement à ralentir d’autant plus la rotation de la barre. D’une manière générale, cette découverte corrobore entièrement les résultats des nombreuses simulations numériques retraçant l’évolution de galaxies barrées.

Référence

  • A slow bar in a dark matter dominated galaxy - Laurent Chemin & Olivier Hernandez
  • A&A Letter, in press

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