GEPI

De la conception instrumentale
à l’exploitation des observables

Andromède, la cannibale

» jeudi 17 septembre 2009

Une équipe internationale de chercheurs, dont un de l’Observatoire de Paris, vient d’observer la galaxie Andromède (M31) et sa compagne, la galaxie du Triangle (M33). Utilisant le télescope Canada-France-Hawaii (CFH), ils ont détecté la présence d’un grand halo d’étoiles autour d’Andromède. Ce halo de matière aurait été arraché de M33 lors de son passage à proximité de M31 il y a quelques milliards d’années. Cette observation conforte le scénario de croissance des galaxies par cannibalisme d’autres galaxies et démontre que la taille réelle de certaines galaxies est beaucoup plus grande que les disques observés. Ce résultat a été publié dans Nature le 3 septembre 2009.

Le scénario actuel d’évolution des galaxies propose que celles-ci deviennent de plus en plus massives par absorption de plus petites galaxies. Ce cannibalisme galactique, constituant le modèle de croissance hiérarchique, provoque des effets gravitationnels (effets de marée) lors des passages successifs des petites galaxies près des galaxies plus massives avant une absorption finale. Des étoiles et du gaz sont arrachés et dispersés sur de grandes étendues autour de la galaxie centrale et des galaxies satellites, formant d’immenses halos d’étoiles. Observer ces concentrations permet de mieux comprendre ce scénario de croissance hiérarchique des galaxies, mais les galaxies étant des objets très éloignés de nous il est très difficile d’observer ces halos d’étoiles et de gaz.

Figure 1
Image optique (étoiles) des perturbations autour de M31 et M33. La Lune apparaît à la même échelle en haut à gauche ainsi que les images « classiques » des disques visibles des galaxies. On y voit parfaitement la dissémination importante des étoiles le long de courants de marée produits par l’interaction entre ces deux galaxies et d’autres galaxies naines. Les cercles en pointillés autour d’Andromède et de M33 correspondent à des distances respectives de 900 000 et 300 000 années-lumière. © Alan McConnachie et collaboration PAndAS.

La galaxie Andromède, M31, est la galaxie spirale la plus proche de nous et possède une galaxie compagne M33. Le système en interaction est étudié dans le cadre du « Pan-Andromeda Archeological Survey » (PAndAS) pour détecter la présence de halos d’étoiles éjectées lors de l’interaction entre M31 et M33. L’équipe internationale (A) utilise depuis 2008 la caméra MegaCam sur le télescope de 3,6m du CFH.

Les observations mettent en évidence la présence de nombreuses étoiles dessinant des structures lumineuses extrêmement étendues autour d’Andromède. Ces étoiles n’ont pu être formées par Andromède mais sont la conséquence des effets de marée arrachant gaz et étoiles de la galaxie du Triangle et d’autres galaxies naines lors de leur passages près d’Andromède. De plus, les déformations observées des disques de gaz dans M31 et M33 sont probablement produites par le passage de M33 près de M31.

Figure 2
Projection stroboscopique, obtenue à partir de la simulation numérique du passage de M33 à proximité de M31. La simulation suggère que la galaxie M33 va bientôt être absorbée par Andromède. © John Dubinski et collaboration PAndAS.

Les chercheurs ont utilisé un modèle de simulation numérique pour reproduire la rencontre entre les deux galaxies. M33, est passée à proximité d’Andromède, il y a quelques milliards d’années à une distance minimale de 40 kpc. Les effets de marée ont déformé M33 lui arrachant gaz et étoiles, ces débris étant attirés par M31 tandis que les disques d’Andromède et de M33 sont déformés par le passage du compagnon. Ce scénario reproduit parfaitement ce qui vient d’être observé autour d’Andromède par le programme PAndAS.

Cette observation permet ainsi de mieux comprendre le scénario de croissance hiérarchique des galaxies, et en particulier le nombre de galaxies naines autour de galaxies massives. Ces nouvelles observations montrent en effet, et pour la première fois, que le nombre observé de galaxies naines autour de galaxies massives est très proche des prédictions théoriques.

Le film de la simulation

(A) L’équipe est composée de :
Alan W. McConnachie (Herzberg, Ca), Michael J. Irwin (Cambridge, UK), Rodrigo A. Ibata (Strasbourg, Fr), John Dubinski (Toronto, Ca), Lawrence M. Widrow (Queens, Ca), Nicolas F. Martin (Heidelberg, De), Patrick Cote (Herzberg, Ca), Aaron L. Dotter (Victoria, Ca), Julio F. Navarro (Victoria, Ca), Annette M. N. Ferguson (Edimbourgh, UK), Thomas H. Puzia (Herzberg, Ca), Geraint F. Lewis (Sydney, Au), Arif Babul (Victoria, Ca), Pauline Barmby (Ontario, Ca), Olivier Bienayme (Strasbourg, Fr), Scott C. Chapman (Cambridge, UK), Robert Cockcroft (Ontario, Ca), Michelle L. M. Collins (Cambridge, UK), Mark A. Fardal (Amherst, USA), William E. Harris (Ontario, Ca), Avon Huxor (Bristol, UK), A. Dougal Mackey (Edimbourgh, UK), Jorge Penarrubia (Cambridge, UK), R. Michael Rich (Los Angeles, USA), Harvey B. Richer (Vancouver, Ca), Arnaud Siebert (Strasbourg, Fr), Nial Tanvir (Leicester, UK), David Valls-Gabaud (Meudon, Fr), Kimberly A. Venn (Victoria, Ca)

Communiqué de presse du CNRS

Référence

  • The remnants of galaxy formation from a panoramic survey of the region around M31
    Mc Connachie et al : Nature, 3 Septembre 2009

Contact

David Valls-Gabaud (Observatoire de Paris, GEPI, et CNRS)

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